Puisque nous sommes aussi des animaux, nous sommes programmés pour la survie de l’espèce, et le lien mère-enfant en est la condition sine qua non. « Dès sa naissance, l’enfant “imprime” sa figure d’attachement, que ce soit sa mère, son père, ou un autre », rappelle Boris Cyrulnik. Autrement dit, il apprend à reconnaître son odeur, son goût, sa voix. Et plus tard, son visage. C’est à partir de cette « empreinte » que le lien va se faire.
Pour des raisons génétiques, des dysfonctionnements organiques de la mère ou de l’enfant, cette empreinte peut ne pas se former. « L’attachement est un tissu qu’un enfant et sa mère tricotent toute leur vie, souligne Boris Cyrulnik. S’ils sont séparés à la naissance, ou si les débuts se passent mal, le tricot se fait avec un trou, que la suite des événements va plus ou moins pouvoir réparer. » Car parallèlement se tisse l’attachement affectif, puis culturel. L’humain n’évolue pas dans un univers exclusivement biologique : l’environnement sensoriel et familial affecte directement son cerveau. Des découvertes récentes l’ont prouvé. Dans son dernier ouvrage (De chair et d’âme, Odile Jacob, 2006), Boris Cyrulnik rapporte des études menées dans des orphelinats roumains, où les enfants sont élevés dans un isolement quasi total, et un examen au scanner montre une atrophie du lobe préfrontal et du cerveau limbique, responsable des émotions. Quand certains de ces enfants sont placés en famille d’accueil, leurs zones reprennent une taille normale dans l’année qui suit. « On construit ce lien, même biologique, toute sa vie, poursuit le neuropsychiatre, il peut donc se rompre. L’amour, même pour sa mère, n’est pas inaltérable. » Ce lien si fort est donc fragile, mouvant, et la querelle entre les tenants du « tout-biologique » (l’attachement mère-enfant est programmé biologiquement) et ceux du « tout-culturel » (l’amour pour sa mère relève de la norme sociale) n’a plus lieu d’être. « Il faut dépasser ces clivages obsolètes, assure Boris Cyrulnik. L’inné, l’acquis, c’est un vocabulaire idéologique. La biologie n’est rien sans la culture, et vice versa. C’est comme se demander si, pour respirer, qui des poumons ou de l’oxygène est le plus important. Un cerveau sain sans émotions ne donnera rien de bon, des émotions sans cerveau non plus. L’être humain est un système complexe avec une convergence de causes et une émergence de conséquences multiples : biologiques, psychologiques et sociales. » Tout comme la qualité de ses relations...
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