Dans"Une Vie Bouleversée" (son journal), Etty Hillesum me délivre d'une tentation : "Ce matin, je me suis octroyé une demi-heure de dépression et d'angoisse".
Si je repense à mon enfance, je vois bien que les moments tristes, les chagrins et la peine, je ne les ai pas vécus à fond. Je n'ai fait que les accepter en surface. (...) Les souvenirs douloureux, rejetés, agiraient-ils comme des bombes à retardement qui, tôt ou tard, si je ne les désamorce pas, me péteront à la gueule ? Extrait du "Philosophe nu" d'Alexandre Jollien. Gardons en mémoire qu'une épreuve qui revient systématiquement signale que l'on est passé à côté d'un apprentissage. C'est un cadeau, une nouvelle opportunité d'ouvrir les yeux sur ce que nous n'avons pas compris jusque-là. Étonnamment, nous allons nous rendre compte que nous faisons vivre à notre entourage et à nous-mêmes, sans arrêt, cette même épreuve. Or, le meilleur moyen de ne plus être impacté par cette blessure est de cesser de la faire vivre aux autres et à nous-mêmes. Extrait de La clé de notre énergie de Natacha Calestrémé. Les choses arrivent, les événements, les anecdotes, les soubresauts des jours.
Parfois la vie semble n'être que cela, rien que cela. Elle se faufile entre une multitude d'accidents heureux ou malheureux, de rencontres et de séparations, de détails infimes dont le sens nous échappe le plus souvent. On se demande quand tout va s'organiser enfin, être tangible, évident. On attend, tout se disperse dans le désordre et pendant ce temps la vie est en marche, en fuite même, car chaque jour ou presque la mort nous chuchote, Viens, ne cherche plus, repose-toi, je m'occupe de tout. Elle non plus nous ne la reconnaissons pas, nous savons seulement qu'elle doit advenir. Son murmure se perd dans le vacarme du monde, pour mieux nous surprendre, nous saisir au vol...
Notre vie à chacun est un roman. Vous, moi, nous vivons prisonniers d'une invisible toile d'araignée dont nous sommes aussi l'un des maîtres d'œuvre. Si nous apprenions à notre troisième oreille, à notre troisième œil, à saisir, à mieux comprendre, à entendre, à voir ces répétitions et ces coïncidences, l'existence de chacun deviendrait plus clair, plus sensible à ce que nous sommes, à ce que nous devrions être. Ne pouvons-nous pas échapper à ces fils invisibles, à ces " triangulations ", à ces répétitions ? Nous sommes finalement, d'une certaine façon, moins libres que nous le croyons. Pourtant, nous pouvons reconquérir notre liberté et sortir de la répétition, en comprenant ce qui se passe, en saisissant ces fils dans leur contexte et dans leur complexité. Nous pouvons enfin vivre ainsi " notre " vie, et non celle de nos parents ou grands-parents, ou d'un frère décédé, par exemple, et que nous " remplaçons ", à notre su ou insu... Ces liens complexes peuvent être vus, sentis ou pressentis, du moins partiellement, mais généralement on n'en parle pas : ils sont vécus dans l'indicible, l'impensé, le non-dit ou le secret. De l'inconscient au génosociogramme Extrait de "Aïe, mes aïeux". L’enfant qui naît est d’emblée inscrit dans une filiation, dans une lignée, ou plus exactement une double lignée, la maternelle et la paternelle. Le bain familial dans lequel il tombe va l’imprégner, le construire. L’enfant va épouser de manière involontaire sa culture familiale : des manières de penser, de sentir, de se comporter et d’interagir qui vont donner un style familial. Le nouveau-né reçoit une double mission : d’une part, il doit se constituer comme sujet, progressivement s’individuer, construire sa personnalité, donc se différencier. D’autre part, il doit être porteur du modèle familial, de ses valeurs pour en assurer la perpétuation. Il est un maillon d’une chaîne, il hérite de ses parents et de ses ancêtres et transmettra plus tard à la postérité. Donc, il oscille entre appartenance et différenciation. Comment transcender cette apparente contradiction ? Comment concilier loyauté et créativité ? Les membres d’une famille sont reliés par un pacte implicite qui permet d’assurer la continuité de la chaîne et de transmettre le modèle familial. Piera Aulagnier (1975) a appelé ce pacte implicite « contrat narcissique ». Grâce à lui, l’enfant reçoit ainsi une place dans une famille, un nom, une identité, une éducation, une appartenance et la protection qui l’accompagne, autant d’éléments qui concourent à sa croissance et à son développement. C’est, comme le dit Catherine Ducommun-Nagy (2006), une sorte de « filet de sécurité ». En échange de quoi il reprend à son compte les idéaux familiaux et se prépare à les transmettre, assurant ainsi la perpétuation du modèle familial. Les individus de la chaîne sont ainsi liés par une dette, une dette jamais soldée qui se transmet de génération en génération afin d’assurer la pérennité du clan. Je te suis redevable pour tout ce que tu m’as transmis. Le non acquittement de la dette serait donc le moyen d’assurer la perpétuation des valeurs du groupe. Tout le ciel étoilé, toute la terre nourricière, toute la splendeur de l'aube et du soir, toute la gloire du printemps et de l'automne, tout le Souffle aimant de l'univers porté par un vol d'oiseaux migrateurs, tous les hauts chants humains montés de la vallée des larmes, tout cela constitue un "ici et maintenant" où l'éternité se ramasse. Cet "ici et maintenant" ne peut rayonner, irradier, faire fleurir et porter fruit, susciter écho et résonance et, par là, prendre tout son sens que s'il est vécu par une âme.
Page 152 du livre "De l'âme". |
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